Projet sucrier de Batouri : L’Etat s’engage à accompagner le projet

Publié le par Bernard Bangda

Des images du site du projet à TikondiDes images du site du projet à Tikondi

Des images du site du projet à Tikondi

C’est ce qui ressort d’une récente correspondance du ministre des Mines, de l’Industrie et du Développement technologique (Minmidt) adressée au directeur général de Justin Sugar Mills SA (JSM).

L’on s’achemine peut-être vers la reprise du projet agroindustriel sucrier de Batouri dans la région de l’Est. Du moins si l’on s’en tient à ce qu’écrit le Minmidt, Ernest Gbwaboubou, dans sa lettre n°000196/L/MINMIDT/CAB du 09 août 2016 dont l’objet porte sur le « Projet de réalisation du Complexe Agro-industriel sucrier par JSM SA ». Dans cette autre missive dont « Le Quotidien de l’Economie (LQE) » a pu obtenir copie, le Minmidt informe le directeur général (DG) de JSM, Dieudonné Mirabeau Dong Thry Dong, de ce que « le Gouvernement de la République du Cameroun confirme sa détermination à assurer un accompagnement administratif à la société [Justin Sugar Mills SA] dans la mise en œuvre du projet sucrier à Tikondi, interzone Bertoua-Batouri ». Ce nouveau rebondissement s’explique, selon Ernest Gbwaboubou par « la reconnaissance du gouvernement de la conformité [de ce projet] à la politique industrielle du Cameroun, implémentée par le Minmidt, et aux objectifs du DSCE pour l’amélioration de l’efficacité du développement économique du Cameroun ». Dans la foulée, le Minmidt interpelle toutes les parties prenantes sur l’intérêt à ce que ce projet soit réalisé avec succès. Au premier rang desquels JSM dont le promoteur, malgré toutes les assurances (remise du passeport, main levée de l’interdiction de circuler, retrait de la plainte contre lui, ndlr), reste introuvable. Ensuite, les communes riveraines, 11 au total, à qui le Feicom réclame en tout 562.500.000 FCFA qu’il avait mis à la disposition de JSM SA comme leur participation au capital social de cette entreprise. Et ce, alors que, dans la suite d’une réunion tenue le 09 mai 2014 au premier ministère entre les parties prenantes du projet, JSM SA avait voulu rembourser cette somme au Feicom.

Investisseurs étrangers

« Le plus intéressant dans cette correspondance, réagit un des cadres de JSM, c’est que le Minmidt évoque nos partenaires financiers étrangers ». En effet, dans sa lettre du 09 août 2016, Ernest Gwaboubou écrit que « [le Gouvernement] encourage toute forme d’investissement de partenaires étrangers, de diverses institutions financières et de banques internationales et locales ». On s’attend alors que JSM engage le marketing qui lui avait permis en moins d’un an d’obtenir des accords de prêts ou de financement d’un montant total de 68,045 milliards de FCFA du Fagace (9,069 milliards), de la Bdeac (20 milliards) et d’Afreximbank (38,976 milliards). Bien plus, JSM avait obtenu d’Afro-Asian Insurance Services Ltd, une société d’assurance-risques basée à Londres en Grande-Bretagne, une promesse d’assurer son projet à hauteur d’un peu plus de 110 milliards de FCFA. L’adoubement du gouvernement camerounais entre dans la logique soutenue par le Premier ministre, Philémon Yang, qui a toujours voulu garder le caractère privé de ce projet en l’accompagnant par les pouvoirs publics dans les conditions légales et réglementaires en vigueur. C’est ainsi que, écrit Ernest Gbwaboubou, « Le gouvernement de la République du Cameroun s’engage à faire bénéficier à JSM […] des incitations financières et des facilités administratives en vue de la réalisation de ce projet privé ». Il invite enfin les dirigeants de cette entreprise à « entrer avec les structures compétentes en vue de l’accomplissement de toutes les formalités requises ». La balle est donc à présent dans le camp de M. Dong Thry Dong.

En rappel, le complexe agro-industriel sucrier de l’Est, d’un coût total de 60 milliards de FCFA, comprend une usine de production initiale de 60.000 tonnes par an, des plantations de cannes à sucre sur 15.000 hectares, sur une superficie totale de 155.000 hectares à Tikondi et Bodongoué, dans l’arrondissement de Batouri, et une unité de production de 16 MW d’électricité à partir des déchets de l’usine. Pourvoyeur de 5.000 emplois directs et 2.500 indirects, selon les prévisions, il devait être opérationnel en mai 2014.

Bernard Bangda

Dénouement

Paul Biya tranche le débat

Dans ce dossier, l’entrée en matière du plus haut sommet de l’Etat a permis de mettre un terme aux conflits d’intérêt entre les différentes parties.

« Face à cette situation de crise, […] seule votre implication personnelle peut sortir ce projet de cette impasse, afin que l’Etat du Cameroun […] rétablisse notre société privée dans ses droits après la suspension imposée par le Ministre Emmanuel Bonde en nous délivrant une lettre de confort qui nous permettra de continuer convenablement notre chantier conformément au protocole d’accord exclusif signé le 12 avril 2012 ». Ainsi écrivait le 31 janvier 2015, le DG de JSM, Dieudonné Mirabeau Dong Thry Dong, au chef de l’Etat Paul Biya. Et la réaction de ce dernier ne se fait pas attendre. Le 02 mars 2015, « sur très hautes instructions », le secrétaire général de la présidence de la République (SG/PR) écrit concomitamment à son homologue du Premier ministère (SG/PM) et au DG de JSM pour les informer de ce qu’« il [le PR] demande au PR de bien vouloir [lui] faire le point du projet agroindustriel Justin Sugar Mills, en concertation avec le Minmidt, assorti de propositions adéquates en vue de la bonne fin dudit projet et des modalités de délivrance de lettres de confort aux investisseurs privés ». Le 26 mars 2015, après avoir accueilli Paul Biya de retour d’Europe, Philémon Yang réunit autour de la table les parties prenantes à ce projet (Minmidt, Minfi, Minepat, communes riveraines, JSM). Les multiples tentatives de certains maires de mettre à l’écart le promoteur butent sur la volonté du PM, guidée par les instructions présidentielles, de maintenir le caractère privé d’un projet porté par une société unipersonnelle. Et lorsque, le 02 octobre 2015, Paul Biya nomme un nouveau Minmidt, l’on y voit une réponse à l’examen de ce dossier au plus haut niveau de l’Etat. Le nouveau Minmidt, suivant les instructions de sa hiérarchie, finit par délivrer la fameuse lettre de confort sur laquelle achoppaient les relations entre le DG de JSM et son prédécesseur. « Aujourd’hui que l’Etat du Cameroun a accepté d’être la caution morale de ce projet, on espère que les vannes financières longtemps fermées pour absence de lettre de confort vont enfin s’ouvrir », susurre une source haut placée au Minmidt. « Si on me délivre ce document, je relance le projet au plus une semaine après », avait déclaré le DG de JSM joint au téléphone en avril 2016 par LQE.

Bernard Bangda

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